mercredi 6 octobre 2021

Avertissement

Normalement, dans un blog, les articles les plus récents sont ceux qui apparaissent en premier, les plus anciens étant accessibles à la fin par un menu déroulant.
Par contre, pour faciliter la lecture, les articles de ce blog, maintenant terminé, sont classés par ordre chronologique.
Pour cela, les dates d'édition ont été modifiées, les articles plus anciens devenant les premiers à la lecture. Ce qui fait que la mention de bas de page "articles plus anciens" renvoie en fait aux articles suivants, plus récents.

L'introduction de Jean-Marie Mengin



GR 4

Sentier Méditerranée - Atlantique

(Grasse - Royan)

-1529 km-



Le GR 4 Méditerranée – Atlantique parcourt la France d’est en ouest, depuis Grasse (Alpes-Maritimes) jusqu’à Royan (Charente-Maritime). Il traverse les Alpes (Préalpes du Sud), la vallée du Rhône, le Massif central et le Bassin d’Aquitaine.
Ce faisant, il passe dans les parcs naturels régionaux des Préalpes d'Azur, du Verdon, du Lubéron, des Monts d'Ardèche, des Volcans d'Auvergne, de Millevaches en Limousin et de Périgord-Limousin. 

J’ai parcouru ce GR de mai 2014 à septembre 2021, épaulé par Viviane que je retrouvais avec notre camping-car chaque jour aux étapes. 


https://gr4dejmmengin.blogspot.fr



Mardi 27 mai 2014 : Grasse – Caussols.

Le GR 4 débute à la sortie nord de la ville de Grasse (Alpes-Maritimes) sur la route Napoléon (540 m d’altitude), à la jonction avec le GR 51, dans les Préalpes de Castellane (plus spécifiquement Préalpes de Grasse). Ici commence également le parc naturel régional des Préalpes d’Azur
A 10h, je m'engage sur le sentier. Pas le temps de se mettre en condition : la montée est de suite très raide, dans la garrigue.


Les Préalpes sont de hauts plateaux calcaires, ou plans, orientés est-ouest. Comme le sentier se dirige vers le nord, cela présage des dénivelés positifs et négatifs constants pour les jours à venir. 
De temps en temps, des trouées dans la végétation permettent d’apercevoir derrière soi la mer Méditerranée. Toutes sortes d’oiseaux égayent la forêt de leurs chants. Le raire d’un chevreuil résonne un peu plus bas dans les frondaisons. Un portillon anti-engins motorisés a été largement contourné, vu les traces de pneus…
A 910 m, le sentier rejoint le plateau de la Malle, emprunte une route peu fréquentée (excepté par le facteur), coupée par un raccourci. Au château de la Malle, une pancarte annonce que le GR 4 s’engage dans une zone de troupeaux protégés par des chiens patous.
Des plantes grasses rouges qui pourraient être de l’orpin noirâtre tapissent un sol calcaire. Le sentier franchit la crête des Ferriers au col du Clapier (1257 m). C’est un site de protection de la vipère d’Orsini, espèce rare et menacée qui ne vit que dans les Alpes du sud.
Je fais halte au col pour casser la croûte, avec un repas tiré du sac, assis sur des rocailles, en face d’une borie (abri en pierres sèches pour les bergers). Epoustouflant décor de pierres.


Dans un causse calcaire désertique et crevassé, je descends vers le plateau de Caussols. Je rejoins une petite route qui me mène pour 14h à la mairie de Caussols devant laquelle m’attend Viviane avec notre fourgon camping-car Fiat Ducato.

Par la suite, nous roulons jusqu’à Castellane (Alpes-de-Haute-Provence) pour y faire quelques courses.

Nous sommes de retour à Caussols et nous installons à 17h sur le GR à côté de la chapelle St-Lambert pour y passer la soirée et la nuit. Un camping-cariste curieux viendra nous y rendre visite pour discuter un peu, car il possède le même genre de fourgon…

Mercredi 28 mai 2014 : Caussols – Gréolières.

Je me mets en route à 9h.
Le sentier attaque aussitôt la montée vers le plan du Fanguet puis grimpe vers un collet à 1267 m, au travers de formations calcaires torturées. 


Il atteint le plateau de Calern, une étendue karstique désertique. Il se poursuit vers un gros cairn, contourne de loin les bâtiments de l’observatoire de la Côte d’Azur.
Sur le plateau calcaire, s’étalent anémones, orchidées, renoncules alpestres


Les chants lancinants de la huppe fasciée et du coucou ponctuent le parcours. Dans une petite vasque inondée d’une roche du sentier, j’observe des iules (myriapodes diplopodes) affairés auprès d’œufs de batraciens. Les dévorent-ils ? L’iule est une espèce détritivore, pouvant éventuellement grignoter quelques cadavres…
La sente imprécise slalome parmi les rochers. Le balisage dépend des supports existants. Donc, quelques hésitations et demi-tours…
Je passe près d’une arche naturelle. En contrebas, une source dans un rocher forme un puits.
Le sentier franchit une croupe et s’abaisse en direction du ruisseau du vallon des Peysses. Sur la rive opposée, une petite route en terre mène à Cipières.
C’est peu avant l’entrée du village que je casse la croûte, brièvement.

Cipières est un pittoresque village dominant la rive droite du Loup. Perdant le balisage, je me renseigne auprès d’un habitant pour qu’il m’indique la bonne direction. En face on aperçoit le village perché de Gréolières qui sera ma destination pour aujourd’hui. Mais auparavant, je dois d’abord descendre par un bon chemin jusqu’à la rivière (574 m) que je franchis sur un vieux pont en dos d’âne. Et maintenant, il me faut remonter par un sentier en lacets jusqu’à Gréolières (820 m).
Je parcours les ruelles de ce pittoresque village de Provence situé au pied de la cime du Cheiron. Je peine à retrouver Viviane, après avoir plusieurs fois traversé le village. Finalement, c’est elle qui me rejoindra vers 14h sur la base de mes indications.

Nous roulons jusqu’à St-Vallier-de-Thiey pour y rejoindre un camping ouvert toute l’année, non loin de Grasse. Nous y passons l’après-midi et la nuit.

Jeudi 29 mai 2014 : Gréolières – route de Gréolières-les-Neiges.

De retour à Gréolières, je commence à marcher à 10h40 sous un chaud soleil.
J’atteins rapidement les ruines de l’ancien village. Là, une éco-guide du parc naturel régional des Préalpes d’Azur attend les randonneurs pour les informer de la présence de troupeaux en montagne et donner quelques conseils sur le comportement à observer face aux chiens patous.
Le GR 4 s’élève en un sentier en zigzag jusqu’aux barres du Cheiron. Plus il grimpe, plus en contrebas le village s’éloigne, et la vue s’élargit. Un aigle royal plane.
Après avoir franchi les barres, la vue sur la vallée disparaît. Je passe une première crête pour cheminer dans un univers de rocailles et de bosquets.
Je fais une halte pour manger, assis sur un rocher. Passe un vététiste, un peu incongru dans ce parcours accidenté.

Par la suite, j’arrive au pas de Coutellade (1500 m). Un peu plus loin, j’atteins un domaine de ski nordique. Pour éviter les conflits d’usage avec les skieurs et préserver la qualité des pistes de ski, un arrêté municipal impose aux randonneurs l’utilisation d’une déviation hivernale. Bien que nous ne soyons plus en période d’enneigement, l’accès de l’itinéraire normal est toujours barré par des câbles. Un oubli, sans doute ! J’emprunte donc le balisage temporaire de la déviation hivernale  qui passe entre les domaines de ski alpin et de ski nordique. Passage plus long et plus scabreux.
Le parcours gagne la station de Gréolières-les-Neiges puis rejoint la route départementale qui y mène, à l’intersection de l’itinéraire d’été où est stationnée Viviane (1428 m). En fait, j’aurais tout aussi bien pu emprunter l’itinéraire ordinaire, car dans le sens inverse rien n’interdit le passage…
Il est 14h30.  Nous allons passer le reste de l’après-midi et la nuit sur place, un espace gravillonné en bord de route. Le temps se couvre et bientôt l’orage éclate. On occupe le temps en lecture et jeux de société. 

Vendredi 30 mai 2014 : Gréolières-les-Neiges – Les Mujouls.

Vu les prévisions météo pour l’après-midi, nous nous levons à 7h, ce matin. Il fait 7° dans le fourgon. Un peu de chauffage au gaz pour réchauffer l’atmosphère…

Je quitte la route de Gréolières-les-Neiges à 7h40. Le ciel est pur, la brume s’élève par dessus la rosée des prés.
Bientôt l’itinéraire s’élève vers un collet à 1459 m puis entame une longue descente raide et étroite. Le panorama est splendide.


Mais après l’orage de la veille, le parcours est dangereux ; il faut assurer chaque pas sur les rochers et les racines glissantes. Les bâtons de marche me sont alors bien utiles.
Une fleur remarquable à grosse cloche rouge, à la répartition restreinte, la fritillaire de Caussols, pousse entre les dalles de calcaire karstique des pentes.
Le sentier devient meilleur et suit une combe pour atteindre les maisons abandonnées de Végay. Je passe auprès de la cascade de Végay, je longe la rivière l’Esteron puis je franchis son affluent la Gironde près du confluent (454 m), après un dénivelé en descente de 1000 m. De l’autre côté de l’Esteron, on aperçoit le village perché d’Aiglun.
Le GR remonte sur l’autre rive de la Gironde par un sentier qui rejoint la D10 à proximité du hameau des Tardons. Des gens commencent à s’installer sur les bas-côtés. Ce n’est pas pour voir passer les randonneurs, d’ailleurs très rares, mais pour une course automobile qui se prépare. Les organisateurs sillonnent la route pour demander par haut-parleur de dégager le terrain ! Heureusement, je n’y reste pas longtemps, car un sentier prend le relais pour rejoindre le hameau de la Clue. La montée s’effectue dans le vacarme assourdissant produit par les participants à la course. Plus haut, le parcours traverse un éboulis, franchit un éperon rocheux et, à travers bois et broussailles, atteint la crête de Charamel (1155 m).
J’emprunte sur l’autre versant un sentier en lacets qui descend vers les ruines d’Abdoun. Les sonnailles d’un troupeau de moutons en pâture se précisent. Comme je n’ai pas envie de tester l’hospitalité des chiens patous, j’effectue un large détour pour contourner le troupeau et rejoindre bien plus à l’ouest le tracé du GR.
Après une pause casse-croûte sur le bord du chemin, je retrouve l’Esteron que je franchis sur une passerelle suspendue.
Le ciel se couvre de gros nuages noirs, le risque d’orage se précise. Je hâte le pas pour rejoindre sur une butte le village perché des Mujouls. A15h, je retrouve Viviane sur un parking à la sortie du village, après 7h20 de marche. C’est alors que la pluie se met à tomber…

Nous roulons jusqu’à une aire de service pour camping-cars, à Annot (Alpes-de-Haute-Provence), afin de vidanger les eaux usées et faire le plein du réservoir d’eau, tout cela sous la pluie.

Nous sommes de retour à Les Mujouls pour 18h. Nous passons la nuit sur le parking aux abords du village.

Samedi 31 mai 2014 : Les Mujouls – Le Plan d’Entrevaux.

Comme hier, et pour les mêmes raisons météorologiques, je me mets en route à 7h45.
Le GR 4 s’engage dans un sentier caillouteux qui descend à Collongues. Il se poursuit sur une route départementale puis, à hauteur d’une bergerie, bifurque dans la rocaille en une raide grimpée. L’espace forestier résonne du chant des grives musiciennes.
Amirat est encore un village perché que j’atteins en même temps qu’un troupeau de moutons. Sortant du village, je m’engage vers un collet et franchis le ravin du Passé. Je grimpe jusqu’à la crête de Chadastier (1154 m). Là je descends le versant nord jusqu’à l’Hubac d’Amirat et, par une sente à travers prés, je rejoins un sentier qui mène au vallon du Castelet.
Ici se termine le parc naturel régional des Préalpes d’Azur. C’est également la limite des départements des Alpes-Maritimes et des Alpes-de-Haute-Provence.

Peu après le pont, le GR emprunte un chemin dans les prés, traverse Castellet-St-Cassien puis remonte une longue combe sous forêt. Des traces de la grêle d’hier soir subsistent encore par endroits. Le sentier de randonnée débouche sur un col, à côté d’un pylône, où sont entreposés sous un cerisier un vieux tracteur, une table et des chaises. Je choisis de m’arrêter là pour manger, utilisant les chaises et la table, le dos au soleil. J’en profite pour picorer quelques cerises.
Par la suite, le sentier s’engage à flanc de vallon et rejoint une crête. Puis c’est une longue descente en lacets vers la vallée du Var. J’atteins un espace nu de grandes plaques de roches calcaires lissées que je dois traverser. Je débouche alors à 14h, après le passage de quelques ravins, sur Entrevaux.
C’est une pittoresque petite ville située sur la rive gauche du Var. Elle fut ville frontière entre la Provence française et les états du roi de Sardaigne. Plus tard, elle fut fortifiée par Vauban qui a remanié la citadelle.
Je retrouve Viviane au débouché du sentier. Entre-temps, elle a lié connaissance avec une dame qui habite la maison voisine.
Le balisage du GR s’arrête à la gare. Il ne reprend qu’au Plan d’Entrevaux, à 2km au nord-ouest, car il est déconseillé d’emprunter la N202, très fréquentée. Il existe une possibilité de prendre le train, mais comme j’ai retrouvé Viviane, nous empruntons avec le Ducato cette route, effectivement fréquentée, jusqu’au Plan d’Entrevaux.

Puisque nous cherchons un lieu pour nous arrêter, nous continuons la route jusqu’à rejoindre le camping du Brec, en face sur l’autre rive du Var. Comme il se doit, la pluie s’invite. [Pour prendre connaissance de mon courrier, je tente un essai de liaison internet par wifi. Après plusieurs tentatives auprès des tenanciers du camping, l’opération s’avérera infructueuse !]

Dimanche 1er juin 2014 : Le Plan d’Entrevaux – Ubraye.

A 8h30, nous traversons en Ducato le village du Plan d’Entrevaux. Viviane m’abandonne à un carrefour avec une petite route qui mène à une ancienne école puis un oratoire.
Rompant avec la direction sud-nord qu’il suivait depuis Grasse, le GR 4 s’oriente maintenant définitivement vers l’ouest (dans un premier temps, direction sud-ouest jusqu’aux gorges du Verdon).
Je m’engage dans un chemin qui s’élève régulièrement à flanc de montagne. Après quelques lacets, je rejoins une piste, passe devant des ruines, débouche dans des prés et monte en rive gauche d’un fossé. Le parcours se poursuit dans la forêt, franchit de nombreuses ravines avant de parvenir au col de Saint-Jeannet (1278 m).
Zone de tranquillité, sous les arbres, avec un oratoire. Comme j’y fais une pause à l’ombre, un troupeau de moutons dévale vers moi. Mais les plus courageuses des brebis s’arrêtent tout de même à distance respectueuse !
Une pancarte demande le silence, interdit les véhicules à moteur, précisant qu’il s’agit d’un lieu sacré. Un peu plus loin, on aperçoit hors du sentier un prieuré (St-Jean-du-Désert) qui est entretenu par des moines.
Le sentier s’élève vers un col à 1350 m puis s’abaisse vers l’oratoire Saint-Jean.
Je pose mon sac à dos auprès du petit oratoire pour casser la croûte. Je mange au soleil tout en contemplant le paysage qui s’offre à moi.


J’emprunte ensuite un très beau sentier de descente d’abord sous couvert puis en milieu ouvert, sur la rive droite d’un vallon, qui mène à la chapelle ND-de-la-Rivière (958 m). Je rejoins une route puis, par un sentier perdu dans la végétation, je grimpe au village d’Ubraye. Je débouche à 13h30 sur le Ducato, au pied d’une ruelle en escalier.

Nous roulons jusqu’au camping La Ribière, à Annot. Nous y passons l’après-midi sous l’auvent déroulé. Ce soir, nous mangerons d’excellentes pizzas fabriquées par le restaurant du camping.

Lundi 2 juin 2014 : Ubraye – route D102.

A Ubraye, le chemin s’engage entre deux maisons. De suite commence une longue montée à travers la garrigue. Je chemine à flanc de montagne en surplombant les gorges de la Bernarde, passe une croupe ponctuée d’une petite croix. Une crotte sur une pierre assez large me semble pouvoir être celle d’un lynx. Je traverse le village du Touyet (1250 m).
Le chemin facile et agréable serpente en légère montée parmi genêts et lavande. Il traverse une roubine et descend au torrent de la Bernarde qu’il franchit. 


Le GR 4 remonte dans un terrain d’éboulis, grimpe à flanc et atteint le grand replat herbeux du col de Vauplane (1600 m). Ce faisant, il pénètre dans le parc naturel régional du Verdon.


Le col est un stade de neige familial d’hiver et un excellent pâturage d’été. Le panorama est saisissant. Les fleurs abondent sur les vastes prairies.


J’y observe la gentiane printanière et la pédiculaire chevelue


                            Gentiane printanière                                               Pédiculaire chevelue

Je m’arrête pour manger au soleil sur un vieux banc attenant à la baraque d’arrivée d’un téléski.
Par la suite, je traverse la prairie et j’entame la descente vers un torrent jusqu’à la chapelle St-Barnabé. Passant à proximité de bergeries, je gagne la route D102 où je retrouve le camping-car garé à proximité.

Nous retournons au camping La Ribière, à Annot. Une pluie violente va nous surprendre dans l’après-midi.

Mardi 3 juin 2014 : D102 – Castellane.

8h40 : le GR 4 s’engage sur un sentier très large en bordure de forêt. Vue panoramique  sur les lacs artificiels de Castillon et de Chaudanne.
Un rouge-gorge chante sur la cime d’un pin, alternant rythmes lents et accélérés variés à l'extrême, avec une tonalité très haute, un timbre perlé et « liquide ».
Le GR descend dans un cirque au pied du Teillon, s’aventure à travers un torrent à sec. Il utilise un chemin qui traverse l’ubac de Clot d’Agnon puis l’adret des Gravières et descend à La Garde.
Après la traversée du village, il se poursuit le long de la route et s’enfonce en un chemin creux qui atteint un camping. Il rejoint bientôt une grande route qui longe le Verdon et gagne Castellane.
Franchissant un vieux pont, j’atteins à midi un grand parking à l’entrée de la ville, où est stationnée Viviane. Nous mangeons sur place dans le Ducato.
C’est ici que j’arrête provisoirement ma randonnée.



Fin de la 1période





Vendredi 22 mai 2015 : Castellane – auberge du Point Sublime.

Parvenus mercredi dans les Alpes-de-Haute-Provence, nous avons passé la nuit dernière au camping municipal Carajuan (commune de Rougon), au bord du Verdon.

Porte d’entrée des gorges du Verdon, Castellane semble protégée par sa haute falaise de 184 mètres sur laquelle la chapelle Notre-Dame du Roc domine la ville.
Je suis sur place à 8h30 pour débuter ma randonnée. Le GR 4 s’embranche en face du grand parking pour longer la rive droite du Verdon. Il contourne la ville et rejoint la route des gorges à la sortie de l’agglomération, commence à grimper sur une petite route, franchit un torrent sur un pont. Délaissant le bitume, il emprunte un sentier sur une voie romaine à flanc de montagne. Le chemin en balcon domine au sud les méandres du Verdon. Au nord, à la faveur d’une éclaircie dans la végétation, l’arête dolomitique des Cadières de Brandis apparaît, "éperon rocheux qui dresse sa haute stature tel un immense château féodal".
Après une grimpée raide sur des flancs arides, j’atteins un oratoire au col de la Chapelle Saint-Jean (950 m). Je poursuis mon parcours parmi des landes de genêts d’Espagne et les touffes d’aphyllantes (ou œillets bleus) de Montpellier, fleurs omniprésentes, caractéristiques des garrigues. Des machaons effectuent leur vol de parade sur les prairies.
J’arrive à Chasteuil, un village perché dominant la vallée du Verdon, habité par une communauté de jeunes artisans. La voie romaine continue de monter et pénètre dans une belle forêt de chênes à laquelle succède une lande de genêts. Je m’arrête le long du chemin pour sortir un casse-croûte tiré du sac.
Par la suite, je sors de la zone boisée pour atteindre un col à 1248 m où subsistent les ruines d’une bergerie. 




Je gagne le vaste plateau de Suech, doline herbeuse étrangement plate et longue à traverser. A l’est, au pied de la barre de Catalan, un troupeau de moutons est là, gardé par des patous, mais suffisamment éloigné de mon parcours pour ne pas inquiéter les chiens. Je contourne la barre avant d’entreprendre une descente raide et interminable à flanc de falaise vers le village de Rougon (930 m). Peu avant, s’offre à moi la vision de la gigantesque faille des gorges du Verdon. Sous le village, près du lavoir, j’emprunte un raccourci qui dévale vers un carrefour de routes et l’auberge du Point Sublime (787 m). Il est 15h10. Viviane est là, sur le parking, avec le Ducato. Le belvédère du Point Sublime permet d’admirer la clue du couloir Samson où se faufile le Verdon.

Nous descendons par la route des gorges et retournons au camping Carajuan pour y terminer l’après-midi et y passer à nouveau la nuit. 

Samedi 23 mai 2015 : Point Sublime – La Palud-sur-Verdon.

A 9h15, depuis l’auberge du Point Sublime, j’emprunte un sentier qui descend par un dénivelé de 180 m jusqu’à une aire de stationnement à l’entrée des gorges.
Là, le Verdon s’engouffre dans le Grand Canyon, gigantesque faille aux parois vertigineuses. 


Le GR 4 emprunte le sentier Blanc-Martel, du nom du géologue Edouard-Alfred Martel et de son guide Isidore Blanc qui ont découvert le Grand Canyon en 1905 lors d’une mission organisée par le ministère de l’Agriculture pour y faire des relevés hydrogéologiques.
Mon topoguide précise que ce sentier de 15 km est réservé aux randonneurs expérimentés bien chaussés bien équipés et qu’il est nécessaire de se munir d’un dispositif d’éclairage personnel.
Le GR 4 descend à travers des roches et des éboulis jusqu’à une passerelle qui franchit un ruisseau, le Bau ; puis il s’engage dans les gorges. Par un escalier, il atteint un premier tunnel, dit du Baou.
C’est le premier d’une série de sept tunnels qui ont été conçus dans le cadre d’aménagements hydroélectriques, abandonnés après la guerre de 1939-1945. Seuls deux sont praticables, les autres étant trop dangereux vu les risques d’éboulement.
Le Tunnel du Baou est long de 670 mètres. Il a la forme d’un « s » et peu après son entrée, à environ 250 mètres, une fenêtre découpée dans la roche permet d’avoir une vue sur le « couloir Samson » où vient de s’engouffrer le torrent.


Dans un premier temps, jusqu’à cette fenêtre, je progresse dans l’obscurité, guidé par sa lueur, aidé de mes bâtons de marche. Par la suite, c’est le noir absolu. La lampe de poche est obligatoire pour pouvoir continuer. Il faut faire attention où l’on met les pieds : de grandes flaques d’eau recouvrent le sol à certains endroits.
Peu après la sortie, se présente un deuxième tunnel, le tunnel de Trescaïre.  Celui-ci n’est long que de 115 mètres. Quatre randonneurs arrivent face à moi, repérables par leurs lampes frontales.
Par la suite, le sentier de randonnée se poursuit sur un chemin horizontal dominant le Verdon qui sort du couloir.


L’itinéraire traverse un éboulis, atteint un chaos rocheux où une rampe de sécurité est crochetée dans la roche. Un panneau signale que le sentier est dangereux par endroits et qu’à partir d’ici il n’y a plus d’alternative.
Le Verdon s’élargit puis se resserre au défilé des Baumes-Fères. Tantôt montant, tantôt descendant, le parcours passe à la Baume aux chiens, à la Baume aux Hirondelles, des grottes creusées dans la falaise. Mes bâtons de randonnée sont bien utiles par moment pour me stabiliser.
Il est à peu près midi lorsque j’arrive au pied de la Brèche Imbert et ses 6 échelles, totalisant 252 marches d’escalier métalliques pour 100 mètres de dénivelé à gravir. Cette brèche permet de franchir l’éperon rocheux de la Mescla. En ce week-end de Pentecôte, les marcheurs sont nombreux, surtout dans le sens inverse, ce qui provoque des embouteillages entre ceux qui descendent et ceux qui montent ! Heureusement, des plates-formes intermédiaires permettent de se laisser le passage.


Après une courte mais violente descente, le GR rejoint le carrefour du sentier de la Mescla, continue au pied d’une paroi rocheuse et atteint la vaste grotte de la Baume aux Bœufs, autorisée au bivouac. En trois lacets, il grimpe à l’éboulis des Guègues que l’on franchit à l’aide d’une main courante et d’un escalier.
Un peu plus loin, je fais une pause pour casser la croûte au bord du chemin.
Je reprends mon parcours par l’Etroit des Cavaliers ; je débouche dans le Pré d’Issane, avec une petite plage de sable fin. Peu après je quitte le fond du canyon pour franchir la barre rocheuse du Pas d’Issane et grimper vers le nord. En une heure, je gagne le chalet de la Maline, perché à 900 m sur la route des gorges D23. Il est 16h. Au gîte du chalet, je m’affale devant une bière artisanale des gorges !

Je rejoins Viviane, garée au bord de la route un peu plus haut. Et maintenant que faire ? Le GR 4 se poursuit entièrement sur la D23 pendant 8 km en raison de ses points de vue remarquables. Seulement, cette route est très fréquentée en toutes saisons, et surtout ce week-end. Nous décidons de tricher et de l’emprunter en camping-car jusqu’à La Palud-sur-Verdon. Effectivement, les points de vue sont époustouflants depuis les différents belvédères tout au long du circuit.



Parvenus à La Palud, nous nous installons au camping municipal à 17h20. Beaucoup de monde en ce week-end de Pentecôte (touristes, sportifs, randonneurs, motards)…

Dimanche 24 mai 2015 : La Palud-sur-Verdon – D957 (Moustiers-Ste-Marie).

A partir de La Palud, ça monte ! Le sentier s’élève le long d’un talweg ; les lacets traversent une piste forestière, suivent une restanque et grimpent vers la montagne de Barbin qui domine les gorges.


Passage à un petit col à 1360 m et cheminement à flanc de montagne.
Je contourne une bergerie en ruine, le jas de Barbin. Une pancarte rappelle que les éleveurs utilisent des chiens patous pour garder les troupeaux.
Je commence à avoir faim. Dans une pinède aérée parsemée de rocailles calcaires, je m’assois sur une souche pour le casse-croûte. Quelques fourmis viennent s’en mêler…
Le chemin se poursuit dans la pinède : occasion de se rendre compte de l’impact des chenilles processionnaires du pin. Plus il y a de monocultures, plus l’atteinte aux arbres est importante. Dans une forêt mixte aux essences variées, les dégâts sont moindres.
Le sentier de grande randonnée atteint le col de Plein Voir (1200 m). Il continue sur la crête jusqu’au col de l’Âne, étroite arête avec une vue étendue, notamment sur le lac de Sainte-Croix.


Un groupe de randonneurs alsaciens me rattrape dans une montée sauvage vers la crête de l’Ourbès. Occasion de discuter des sentiers du Club vosgien que je parcourais à l’époque où nous habitions en Alsace.
Plongée abrupte dans des barres rocheuses jusqu’à rejoindre la route des gorges. Le raffut des motards, qui prennent les gorges du Verdon pour un terrain de jeu, s’amplifie au cours de la descente. Je retrouve Viviane au bord de la D957, à l’entrée de Moustier-Ste-Marie. Circulation infernale de Pentecôte.

Nous empruntons le GR avec le fourgon pour  nous installer vers 16h dans une aire naturelle de camping, à proximité du parcours : un sympathique espace calme chez des paysans. Ils ne vendent pas de cerises, mais on peut se servir...
Dans la soirée, nous faisons une petite balade tous les deux aux alentours.

Lundi 25 mai 2015 : Moustiers-Ste-Marie – château de Pontfrac.

A 9h, je m’éloigne à travers prés puis, par une désagréable piste caillouteuse en lacets, je grimpe vers le sud-ouest. L’itinéraire aborde le plateau de Valensole (768 m), constitué par d’énormes épaisseurs de cailloutis accumulés par la Durance.
Le GR 4 longe la lisière d’une forêt qui couvre les pentes jusqu’au lac de Sainte-Croix que l’on aperçoit en contrebas. Il entreprend ensuite la traversée du plateau, tandis que s’éloignent les gorges du Verdon. Changement complet de paysage : des cultures de lavande, des amandiers, des champs de seigle, etc.
Le sentier parcourt la plaine des Bessons, la plaine de Gourbillane. Aux abords d’un bosquet de chênes truffiers, je fais une halte sur un banc. Une alouette des champs s’envole en chantant puis se laisse tomber au sol comme une pierre. Arrive un couple de randonneurs. « Tiens, c’est "chemise bleue" » dit la femme en m’apercevant. En fait, nous nous étions déjà rencontrés samedi dans les gorges, aux échelles de la Brèche Imbert, et elle m’avait repéré à mon tee-shirt bleu !
Bientôt le chemin empierré passe en crête et s’abaisse vers Roumoules. C’est à 12h30, à l’entrée du village, que j’aperçois le Ducato, garé sous un couvert forestier.
Nous mangeons ensemble dans le fourgon puis je fais une petite sieste. 

A 14h, je quitte le village, franchis le Colostre, grimpe sur un plateau et traverse la plaine de Saint-Maxime au milieu des cultures de lavande. Située sur une colline, la chapelle Saint-Maxime domine Riez. Cette hauteur était occupée dès l'Antiquité pré-romaine par l'oppidum gaulois des Reii, d'où provient le nom de Riez. Cette cité devint un centre important dès l'occupation romaine et le restera pendant tout le Moyen Age. Aujourd'hui, elle est occupée par des sœurs clarisses  au nombre de six.
Dans la descente vers la ville, des panneaux jalonnent le parcours, expliquent la culture des oliviers et la fabrication de l’huile.
La ville est en fête : des groupes jouent des airs folkloriques, une brocante étend ses stands sur la place principale. La ville antique de Riez possède un patrimoine important : des fortifications, un baptistère du VIe siècle, des colonnes de granit, vestiges d’un temple païen du Haut Empire. Le sentier de randonnée quitte la ville le long du Colostre par le chemin des Colonnes.


Je longe un pré où pâturent des moutons gardés par un chien patou, mais heureusement grillagé. Le GR emprunte la route, fréquentée et dangereuse, puis bifurque pour traverser la vallée dans un sentier entouré de fourrés où résonnent les trilles d’un rossignol.
Il me faut maintenant passer la rivière. Oui, mais seul un rocher affleure dans le lit du cours d’eau et une corde usagée détendue sert de main courante. Un peu scabreux. Je lance mes bâtons sur la berge d’en face ; le pied gauche sur le rocher, je m’élance avec le pied droit sur la rive opposée, me hissant avec la corde (qui ne casse pas !). De l’autre côté, le balisage blanc et rouge reprend comme si de rien n’était…
Bientôt, l’itinéraire atteint le château de Pontfrac, un petit manoir isolé au bord d’un chemin goudronné. Je viens de retrouver Viviane à 16h40. Nous stationnons sur place à côté du château pour la soirée et la nuit, après avoir demandé l’autorisation à la propriété attenante.

Mardi 26 mai 2015 : Château de Pontfrac - Gréoux-les-Bains.

A 8h30, je quitte l’emplacement où nous avons dormi. Après 1,5 km de petite route, je m’engage dans un sentier pierreux qui grimpe en pente raide. Montée aussi désagréable qu’hier matin.
Atteignant le plateau, je me dirige au travers de cultures. Une houle frémissante sur un champ de seigle me fait penser aux « Papillons verts » de l’artiste Camboulive (une œuvre exposée dans la salle municipale de St-Apollinaire-de-Rias, en Ardèche, où nous habitons).


Par la suite, un chemin de terre coupe-feu va suivre la crête de St-Pierre à travers des cultures puis en secteur boisé. Je contourne une oliveraie puis j’entre en sous-bois.  Dans la descente vers Saint-Martin-de-Brômes, je me trompe de chemin et atteins trop tôt l’entrée du village le long d’une départementale au bord du Colostre. Belles friches colorées par les coquelicots, en un harmonieux tableau.


A midi, je retrouve Viviane garée à l’entrée d’un camping dont les propriétaires lui ont permis de s’installer.
Je repars dans l’après-midi, par un chemin empierré qui s’élève rapidement dans les pins vers le plateau. Toujours ces maudites pistes caillouteuses en plein soleil.
Là-haut, je traverse d’anciens champs de lavande et je retrouve la forêt. Un très gros pin majestueux précède la descente vers Gréoux-les-Bains. Une jeune randonneuse qui se protège de la chaleur sous un arbre m’interpelle et se renseigne pour savoir si elle est bien sur le GR 4 ; elle m’informe que ma femme m’attend un peu plus bas à l’entrée de la ville ! En effet, sous une pinède, non loin du Verdon, je retrouve Viviane.


Nous retournons alors au camping de St-Martin-de-Brômes, où nous avons mangé à midi.

Mercredi 27 mai 2015 : Gréoux-les-Bains – la Done (Pierrevert).


Vue depuis le camping de St-Martin-de-Brômes

Gréoux-les-Bains est une ville thermale. Viviane me dépose sur les hauteurs à côté du château des Templiers.
Un chemin caillouteux s’élève rapidement sur le plateau, rejoint la D82, fréquentée, très brièvement doublée par une sente. Puis un chemin de terre laisse entrevoir quelques échappées sur la vallée de la Durance où s’achève le plateau de Valensole. Chant de multiples oiseaux, dont l’alouette des champs qui s’élève dans l’azur par dessus les prairies.
Après le mas abandonné du Grand Devenson, je traverse des cultures et débouche sur la route de Manosque que j’emprunte jusqu’au carrefour des Quatre Chemins.



Mas du Grand Devenson

Et maintenant, il va falloir longer la route toute droite, très fréquentée, qui se dirige vers Manosque. J’essaie bien d’utiliser un chemin en contrebas pour éviter la route dangereuse, mais cette diversion en terrain privé ne permet pas d’éviter le pont sur la Durance. Le GR 4 quitte le parc naturel régional du Verdon, traverse la Durance sur un pont étroit et dangereux. Encore deux kilomètres le long de cette voie toute droite à la circulation abominable qui se transforme en embouteillage à l’entrée de la ville. Ce faisant, le GR pénètre dans le parc naturel régional du Lubéron. Préambule inattendu pour ce premier contact avec le parc, et Manosque, la ville de Jean Giono !
Le topoguide m’indique de tourner à droite sur une petite route qui contourne l’entrée de l’agglomération. Mais il n’y a plus de balisage, ou alors de vieilles empreintes à moitié effacées. Viviane a tout de même trouvé le lieu de rendez-vous, au bord du canal de Provence.
Nous traversons la ville en voiture. Par la montée de Toutes Aures, nous atteignons la chapelle St-Pancrace, perchée sur une colline couverte d’oliviers qui domine la ville et la plaine d’alluvions de la Durance.
Nous mangeons sur place, aux abords de la chapelle.

Pour une brève reprise (brièveté due à la chaleur), je poursuis ma randonnée sous les oliviers, les chênes kermès et les genêts à balais au parfum entêtant. C’est un beau sentier de sous-bois qui descend le long d’une ligne de crête.  



Je traverse Pierrevert, un ancien bourg fortifié, et je poursuis parmi des zones urbanisées de lotissements et résidences jusqu’au lieu-dit la Done.

Nous retournons pour 16h à la chapelle St-Pancrace. Nous stationnons sur un emplacement de parking, auprès de la chapelle. Après le départ de quelques locaux, nous restons seuls sur le site.


Nous sortons la table de camping pour nous reposer, lire et faire le point...
Dans la douce luminosité du soir, nous bénéficions d’un point de vue ensoleillé sur Manosque. 


Nous effectuons une balade sur le GR, parmi les oliveraies et les sous-bois ensoleillés parsemés de genêts à balais.


Nous mangerons cependant à l’intérieur du Ducato. Avant de nous coucher, nous admirons encore un panorama sur Manosque, avec une nouvelle luminosité.